#Propaganda : La série ratée d’Arte sur le marketing (notamment participatif)


arte propaganda

Et si on faisait des mini-films sur la société de consommation, ses dérives et ses abus ?” s’est-on dit chez Arte. “Super idée ! Révélons enfin au monde ce qui se cache derrière ‘Storytelling’, ‘Content Marketing’ et autres ‘Marketing participatif’ avec lesquels on nous manipule” a dû rétorquer le stagiaire. “Mais en 5 minutes maximum, les gens veulent des formats courts !” a dû gueuler quelqu’un du fond de la pièce, pour finaliser le brief. Tout ça aboutit à une série de 10 mini-films entièrement réalisés en visuels de banques d’images…

Les pros du marketing ont l’art et la manière d’éveiller des désirs des plus matériels. ARTE se penche sur ce phénomène de « propagande » moderneécrit Positivr, probablement directement copié du communiqué de presse. Brain Magazine nous explique que #Propaganda “dissèque en dix épisodes les plus habiles de ces stratégies et la manière dont, insidieusement, elles façonnent nos désirs voire manipulent l’Histoire” comme “Lucky Strike, qui instrumentalise avec génie l’éveil des mouvements féministes pour associer émancipation et tabagisme ; une histoire glaçante“.

Intéressant sur le fond, mais (1) ARTE ne se penche sur aucun phénomène, à peine explique-t-on un peu quelques notions, (2) la web-série ne dissèque rien du tout, et (3) ça n’a absolument rien de glaçant. Ni d’intéressant. De quoi parle-t-on ? De 10 spots, sur 10 sujets très à la mode de nos jours, et tous liés à la communication :

  1. Mystery marketing (ou comment Apple crée un faux besoin en orchestrant savamment sa communication autour de l’iPhone) ;
  2. Storytelling (ou comment Levi’s manipule l’Histoire en nous faisant croire que les jeans font partie de la culture américaine) ;
  3. Greenwashing (ou comment les pandas chinois ne sont que de la poudre aux yeux du monde pour faire oublier la pollution atmosphérique) ;
  4. Polarisation (ou comment Donald Trump monopolise l’espace médiatique en s’adressant à ceux qui veulent entendre des solutions simples) ;
  5. Content marketing (ou comment Red Bull s’adresse aux vieux – parce que les jeunes en boivent déjà – en sponsorisant des sports extrêmes) ;
  6. Gamification (ou comment Google & Nintendo ont créé Pokémon Go dans l’unique objectif de vendre les données des utilisateurs joueurs) ;
  7. Leaders d’opinions (ou comment Lucky Strike a rendu son paquet vert attractif auprès des femmes en l’associant à la culture française) ;
  8. Marketing participatif (ou comment la NASA utilise et implique les amateurs via internet dans l’unique objectif de ne pas voir son budget baisser) ;
  9. Nation branding (ou comment la production culturelle de Corée du Sud n’a pour objectif que d’attirer des touristes et vendre aux pays émergents) ;
  10. Retro-marketing (ou comment Disney instrumentalise les fans de Star Wars pour, encore une fois, créer des besoins inexistants et se faire de l’argent sur leur dos).

Tout n’est pas faut dans les affirmations ci-dessus : Trump est clivant, la communication est intéressée, le marketing sert à vendre… Oui, les pandas servent aussi à la diplomatie chinoise, la K-pop permet à la Corée du Sud d’être reconnue mondialement, et Red Bull sponsorise les sports extrêmes pour l’association à l’énergie, au dépassement de soi et au courage.

Mais je me demande quelle est l’intention derrière ces films !? Éduquer le grand public ? Faire découvrir des termes méconnus ? Révéler des techniques de manipulation ? Proposer des études de cas à des étudiants d’écoles de commerce ? Profiter d’un prétendu engouement autour de ces termes ? Rien de cela n’est atteint.

L’exercice créatif ? Je ne vois que ça ! L’utilisation excessive d’images provenant de banques d’images m’a tout de suite sauté aux yeux, et c’est là le seul intérêt à cette série. Regardez.

Au bout de 2 à 3 épisodes, vous finissez par ne plus regarder l’image. En effet, les 10 spots sont uniquement réalisés à partir de visuels provenant de banques d’images, ce qui amène une uniformité visuelle très frappante… si ce n’est pas un choix artistique. Le réalisateur, Léo Favier dont voici une interview, a déjà réalisé un court-métrage, fait exclusivement à partir de ce type d’images, appelé “Qui n’a pas sa part d’ombre” :

Dans #Propaganda, je pense que ça aurait dû être mieux valorisé, car l’idée est excellente ! D’autant plus que Arte manie avec brio les tons décalés, le bizarre, l’humour et le second degré dans sa communication de marque. Car une fois qu’on a compris cela, malgré la pauvreté du fond, #Propaganda en devient assez rigolo à regarder !

En fait la dixième vidéo de la série aurait dû traiter du phénomène des banques d’images, ou de l’appauvrissement du paysage visuel commercial, ou de ces mannequins inconnus mais omniprésents. Ainsi, Léo Favier aurait non seulement bouclé la boucle, tout en introduisant une touche d’humour, et il aurait expliqué ce qui rend ses vidéos intéressantes. Parce qu’à défaut du fond, on aurait pu s’amuser avec la forme !

2 Comments

  1. Sympa pour le coup du “probablement directement copié du communiqué de presse”. Mais non, on les reçoit pas de la part d’ARTE. De plus, une simple recherche Google aurait pu lever le doute. Bonne journée.

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  2. Pas du tout en accord avec votre analyse sur cette série. Cela apporte une nouvelle approche de l’étude marketing par des cas concrets, le tout dans une dynamique visuelle très intéressante. On en demande même plus !

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