Qui peur des artistes? , sélection de la collection Pinault (Dinard, août 2009)


Panneau-Dinard-jpg

La ville de Dinard (Bretagne Nord) accueille du 13 juin au 13 septembre une sélection d’œuvres de la collection d’art contemporain de François Pinault. Le Palais des Arts et du Fextival rassemble donc les créations d’une trentaine d’artistes dont mes préférés étaient celles de Takeshi Murakami (néo-pop, peintures et sculptures inspirées entre-autres par l’art manga), Ed Ruscha (pop art “textuel”, non sans parallèles à la publicité), Jeff Wall (photographie cinématographique c’est-à-dire mise en scène), Maurizio Cattelan (Jean-Paul II frappé par une météorite!) et bien sûr le très provocateur Damien Hirst. Mais une autre œuvre a plus particulièrement retenu mon attention : Untitled V de l’allemand Andreas Gursky. Explications.

La salle dans laquelle se situait le grand format photographique (185,5*442,6 cm) d’Andreas Gursky s’articulait autour de trois thèmes : la guerre, la révolte et la consommation. Indéniablement, Untitled V concerne le dernier de ces thèmes (vous vous en doutez…). D’ailleurs, la photographie était exposée juste à côté d’un autre “Untitled (I shop therefore I am)”, non moins imposant travail de Barbara Kruger. La photographie de Gursky, présentée pour la première fois en 1997, allie l’esthétique au sens. Le motif de la (des) chaussure(s) fait référence aux mêmes valeurs, presque marchandes, de l’esthétique et de la consommation.

Gursky-untitled-v-jpg

On y voit donc un étalage de 204 chaussures (sandales, chaussures de basket, de golf, de football et même de vélo), de diverses marques (Adidas, Asics, Fila, Nike, Reebok) et non pas seulement de Nike comme l’assurait l’audioguide pré-enregistré. Il est d’ailleurs étonnant de remarquer qu’il n’y a aucun modèle Puma, dont l’élément graphique distinctif sur les chaussures est le Formstrip. Rapellons que Puma appartient au groupe Pinault-Printemps-Redoute (PPR) de François Pinault. Peut-etre que la François Pinault Foundation s’interdit d’acquérir des œuvres contenant une référence aux marques du groupe… Il faut dire qu’en 1997, le marque ressort à peine la tête de l’eau à la suite d’une période de “business survival“, comme le dit le fabricant lui-même (slideshare.net), pendant laquelle le fabricant n’a guère réussi à sortir des modèles attractifs. Ce n’est qu’à partir de 1998 et ses produits sous licence Ferrari, notamment les chaussures, que Puma a retrouvé la voie du succès.

L’artiste a photographié les objets séparément, avant de faire une recomposition de ses prises à l’ordinateur. L’étalage (et les chaussures?) a été détruit après que les photographies aient été prises et assemblées. L’abondance des détails et la variété des coloris, ainsi que le rigueur du cadrage font de cette énorme photographie un véritable plaisir visuel. C’est amusant d’observer les visiteurs devant cette photgraphie. Certains ne s’y attardent pas ; il est vrai que le(s) motif(s) est très familier et qu’il n’y a rien de surprenant ni de révoltant. D’autres – comme moi – s’amusent à regarder les modèles un par un en se rapprochant au maximum, puis à s’éloigner pour contempler l’ensemble.

L’artiste s’interroge là sur le devenir d’une culture aux logiques économiques, et il sait pertinement que le spectateur est aussi consommateur. Mais les objets de la vie courante, les symboles et les logotypes peuvent aussi être des œuvres d’art, dès lors que leur mise en scène s’inscrit dans une démarche de réflexion vis-à-vis de la société. On en revient au message du travail juxtaposé :

barbara-kruger-jpg

Voilà!

2 Comments

Leave a Reply

Fill in your details below or click an icon to log in:

WordPress.com Logo

You are commenting using your WordPress.com account. Log Out /  Change )

Facebook photo

You are commenting using your Facebook account. Log Out /  Change )

Connecting to %s